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La jeunesse de Mai 68 ou le complexe de la mémoire sélective

Un dossier initialement paru dans le numéro 42 « Décrocher la Lune »

« Soyez réalistes, demandez l’impossible ! », ce slogan politico-poétique illustre bien l’effervescence de la jeunesse en Mai 68 qui voulait « changer le monde » et inventer une nouvelle société plus égalitaire. Cette révolte reste effectivement dans la mémoire collective comme une période d’affirmation politique, d’émancipation des jeunes et de profondes mutations de la société française. Néanmoins, le mouvement de Mai 68 et les engagements de cette jeunesse semblent avoir été depuis partiellement oubliés, instrumentalisés et émiettés. Que reste-t-il réellement de cet élan spontané et collectif qu’a été Mai 68 ? 

Notre dossier tente de répondre à cette question qui gravite autour de trois axes. A travers une reconstitution historique des premières étincelles du brasier à Nanterre s’ouvre une réflexion sur la sélection des cendres historiques sur lesquelles s’est bâtie la mémoire collective. Cette dernière est profondément mouvante : dans un second article, c’est la métamorphose des torches des soixante-huitards en politique, du fait de l’instrumentalisation du mouvement par certains leaders, qui est examinée. L’occasion de s’interroger dans un dernier moment sur ce qui subsiste des cendres du mouvement chez les étudiants actuels : de la simple poussière d’étoiles ou des braises encore fumantes ? 

 

Nanterre la scandaleuse est-elle une oubliée ?

Nanterre s’est longtemps maintenue dans notre mémoire nationale comme le foyer incandescent des luttes étudiantes : le souvenir du mouvement du 22 mars y était pour beaucoup. Toutefois, cette effusion nanterrienne semble péricliter : Nanterre s’oublie. Dans son livre Mémoire Collective, Halbwachs usait d’une métaphore judicieuse : « C’est que l’histoire, en effet, ressemble à un cimetière où l’espace est mesuré, et où il faut, à chaque instant, trouver de la place pour de nouvelles tombes. [1]» L’histoire est un parc funéraire extensif et presque immodéré. La situation est radicalement différente pour le cimetière des mémoires, avare en espace. Dans un jeu d’échanges et d’instabilités du souvenir, chaque nouvelle tombe mémorielle s’érige en lieu et place d’une tombe déjà enracinée. Dès lors, écartelée entre temps et mémoire, Nanterre et son 68 paraissent avoir vu leur concession funéraire dans le cimetière national expirer. 

Se remémorer

Pour ne pas oublier, rappelons les faits. Le 22 mars 1968, dans la toute jeune faculté de Nanterre, à l’accent de Sorbonne déclassée et extra-muros, survint le scandale. Dans le contexte d’une répression contre la Comité Vietnam national une cent-cinquantaine d’anars et de communistes prennent d’assaut la tour administrative de l’université.

Édifiée sur une ancienne zone militaire, bordée de part et d’autre par un bâtiment de la Régie des tabacs et deux bidonvilles totalisant plus de dix mille déclassés et miséreux, la fac de Nanterre-la-Folie avait tout pour être la matrice même de cette implosion. Et la fac en soi ? Pas plus attrayante, si on en croit Robert Merle, dépeinte au milieu de son roman sur le mouvement du 22 mars, Derrière la vitre, comme « cette rectitude et cette galerie désespérante, cafardeuse, une sorte d’interminable couloir de W.C, étiré de A à E [2]». 

De ce carcan, une petite minorité en désire plus. Plus d’émancipation et de libertés. Et, tout d’abord, celle des membres interpellés du Comité Vietnam national. Ensuite, la leur. Les bonnes mœurs les broient. Le 22 mars, ce jansénisme s’apprête à basculer vers un tout autre paradigme : « Vivre sans temps mort, jouir sans entraves » (UNEF Strasbourg, 1967). 

Mais, avant tout, il faut « ROMPRE AVEC DES TECHNIQUES DE CONTESTATION QUI NE PEUVENT PLUS RIEN » (Manifeste du 22 mars 1968). Le mouvement du 22 mars représente tout un microcosme pour repenser l’imaginaire des luttes étudiantes. Entre rupture et genèse, Nanterre-la-folie, torche allumée du mois de mars, gagna mai, Paris et la France entière.

« L’organisation de l’oubli » (Paul Ricoeur)

Alors pourquoi Nanterre et le 22 mars n’inspirent plus ? Pourquoi la mémoire nationale ne semble plus agiter et revendiquer ce souvenir commun ? 

Dans une appréciation mémorielle actuelle, on constate que Mai 68 par sa frontière historique indéfinie tend à absorber tout un ensemble de réalités indistinctes. Où commence et où s’arrête Mai 68 ? Les bornes chronologiques, comme la frontière nationale, s’étendent au fil des années dans les publications historiques. Dans l’ouvrage dirigé par Michelle Zancarini-Fournel et Philippe Artières 68, Une histoire collective (1962-1981), les « événements de mai-juin 68 » sont analysés à l’aune d’une « séquence historique longue », on ne parle plus de Mai 68 mais de « ces années 68 [3]». 

Cependant, la mémoire collective ne peut être aussi exhaustive. Sélective, discontinue et individuelle, la mémoire sacrifie les réalités et les vérités historiques à quelques événements, dates et acteurs, souvent les plus médiatisés. Mai 68 gagne en distorsion et en généralisme, éclipsant par-là les aventures les plus diverses et décisives tel le mouvement du 22 mars. La mémoire collective s’accorde sur « un récit dans lequel Mai 68 jaillit soudain de nulle part, de manière tout à fait spontanée [4]», note Kristin Kross. Nanterre-la-folie s’efface peu à peu derrière le concept-obus de Mai 68. 

Au fil du temps, Mai 68 finit par être conçu par le biais d’un simplisme réducteur, encouragé et accentué par le discours politique et médiatique. Paris gangrène la presque entièreté du mouvement 68. Nanterre, berceau de luttes et de contestations, est oblitérée, tout comme le prolongement de la lutte à la nation et à l’international. Une variété de manifestations étudiantes, ouvrières et populaires, est occultée par l’ombre de la chapelle de la Sorbonne et de la coupole du Panthéon.

« Voir une chose, observait Ricœur, c’est ne pas en voir une autre. Raconter un drame, c’est en oublier un autre. [5]» Il ne faudrait pas oublier que si la conflagration de Mai 68 n’a pour origine exclusive et univoque Nanterre et le mouvement du 22 mars, l’étincelle n’en était pas moins allumée. Si le souvenir collectif du 22 mars peut se maintenir « dans une partie limitée du corps social [6]», à l’échelle nationale, le mouvement semble devenu définitivement historique, en tant qu’événement n’agissant plus sur le temps présent.

À l’inverse, Mai 68 et son généralisme, tout en montrant des signes de fatigue et de délitement au fur et à mesure de la mort de ses acteurs et contemporains, sont à cheval entre l’objet historique et le souvenir collectif infusé. Peu à peu, ce souvenir tend à se maintenir au sein de la société par le fil de la mémoire empruntée, en d’autres termes, par une médiation collective « enrichie du passé historique [7]» (Ricoeur), loin de la mémoire sensorielle de ses témoins. 

Quand la France s’ennuie [8], une avant-garde étudiante a exprimé un désir de subversion politique, sexuel, éthique, poétique, paradigmatique… Au moment où certains occupent les facs, souhaitent rompre, promouvoir une altérité, s’opposer à la chose établie, la folie de Nanterre pourrait regagner les imaginaires comme formidable catalyseur de rupture, d’inventivité et d’autonomie. Maintenant, immobilisons-nous un instant, il faut nous ressouvenir, car Nanterre n’attend plus que nous et notre réminiscence.

Lucas Brangé 

 

[1] : Halbwachs, Maurice. La mémoire collective. A. Michel, 1997, [1950],p.100. 

[2] : Merle, Robert. Derrière la vitre. Gallimard, 1974, p.266.

[3] : Artières, Philippe, et Michelle Zancarini-Fournel. 68. Une histoire collective (1962-1981). La Découverte, 2018, p.11.

[4] : Ross, Kristin. « Mai 68, la mémoire et l’oubli ». Le Monde diplomatique, 2008. 

[5] : Ricœur, Paul. La mémoire, l’histoire, l’oubli. Ed. du Seuil, 2003, p.584.

[6] : Halbwachs, Maurice. op. cit.,p.135.

[7] : Ricœur, Paul. op. cit., p.515.

[8] : Article éponyme et fameux de Pierre Viansson-Ponté paru dans Le Monde le 15 mars 1968.

 

Les soixante-huitards et la politique : meute enragée ou inexistante ?

« Il ne s’est rien passé en France en 1968. Les institutions n’ont pas changé, la condition des travailleurs n’a pas changé, rien ne s’est passé. » Telle est la remarque de Wolf Lepenies sur la mémoire des années post-Mai 68 en politique. Si durant les années 68 (entre 1968 et 1986) la mémoire des changements culturels amenés par cette jeunesse révolutionnaire est mise en avant, l’abondance de littérature, d’émissions de télévision, de traités philosophiques et d’analyses sociologiques ont étouffé un mouvement politique de masse sous les parcours de certains, des chefs de meute autoproclamés leaders ou porte-paroles, qui ont instrumentalisé et confisqué les revendications des jeunes de 68. 

Les soixante-huitards, cette bande de jeunes révoltés « comme des rats et beaucoup d’autres animaux » selon Raymond Aron, sont discrédités, disséqués et caricaturés par les adultes, ceux qui font de la vraie politique, au profit des « figures de Mai 68 » telles que Daniel Cohn Bendit, Laurent Joffrin ou Bernard Kouchner, devenus ensuite « modérés ». Mais comment ce mouvement de masse, qui cherchait à renverser l’élitisme de la politique française, a-t-il pu être réduit à de simples figures, spécialistes autoproclamés, dans la mémoire des vingt années qui lui ont succédé ? Ce paradoxe est tout le propos du livre de Kristin Ross, Mai 68 et ses vies ultérieures

 

Des « enragés [1]», comparés aux révolutionnaires les plus virulents de la Révolution française, voilà quel est le portrait des jeunes de 68 fait par une élite politique effrayée des représailles du « tiers-état », qu’elle décrédibilise. Cette “meute”, désireuse de guillotiner une certaine société française élitiste, a échoué et, dans les années 80, la plupart des militants sont devenus des inconnus. 

Daniel Cohn Bendit, « Dany le Rouge [2]», célébrité de Mai 68, pavé à la main le 22 mars à Nanterre et pancarte brandie le 13 mai devant La Sorbonne, devient dix ans plus tard député vert en Allemagne, comme s’il voulait fuir cette image de jeune anarchiste désirant le bûcher de la société. Mais si même lui, la « voix de Mai 68 », « le vrai leader de 68, le seul en vérité » selon Laurent Joffrin, souhaite se détacher de son rôle de soixante-huitard, la mémoire des jeunes enragés en politique ne peut être que déconsidérée. Trop révoltée selon les Gaullistes, et trop idéaliste selon la jeunesse morale des années 80, la meute des soixante-huitards n’a fait qu’hurler un soir de pleine Lune : elle n’a fait que du bruit, elle n’a rien changé. Pire, elle a échoué. 

 

Ces portes-paroles ex-militants gauchistes et reliques du mouvement développent alors un discours révisionniste de Mai 68 à la télévision et dans leurs travaux écrits.

L’émission « Le Procès de Mai », animée par Bernard Kouchner en 1988 [3], est l’autel d’un sacrifice politique du mouvement des jeunes. Entre caricature d’un ultra-féminisme extrémiste et négation des violences policières, ce jugement éthique de Mai 68 révoque toute conséquence politique, laissant la parole aux « jeunes modérés » de la génération de 86 [4]. Ce jury décrit Mai 68 comme ayant détruit une France faste, riche, glorieuse, dirigée par un président prestigieux, l’ayant transformée en un champ de bataille calciné, où voitures brûlées et pupitres d’universités sont entassés. Une telle représentation de Mai 68 dans cette émission grave dans notre mémoire l’image d’un Quartier Latin mis à feu et à sang par des jeunes révoltés, acharnés et effrénés, qui dévorent le cadavre de la politique réfléchie. 

Des changement culturels, certes, sont soulignés, mais ces ex-gauchistes, vision dégradée et ridée des soixante-huitards, entretiennent une mémoire biaisée, et tous les dix ans dans des émissions commémoratives, parlent à la place de cette masse de militants qui marquait les débuts d’une jeunesse politique, et qui a donné toute son ampleur à Mai 68. Nier cette masse est nier Mai. 

 

Mais la mémoire de Mai 68, en plus d’être niée, est reniée dès 1976. Son image trop farouche est reléguée vers la sphère éthique par d’anciens combattants comme Kouchner ou Weber, qui souhaitent donner une image socioculturelle à Mai 68 en la démembrant de ses revendications politiques, afin d’oublier leurs « erreurs du passé ».

Ainsi, la mémoire de Mai 68 est défigurée par ceux qui s’auto-proclament ses défenseurs : oubliée par son chef Danny le Rouge devenu Vert [5], puis décriée par la génération morale des années 80 qui pointe du doigt des jeunes trop extrémistes. Ce sont eux qui, en parlant de Mai 68, ont favorisé l’oubli de la meute. On se remémore Mai 68 en politique comme la représentation d’une masse grouillante par une élite taciturne. La génération des soixante-huitards, invisibilisée et oubliée, aura donc appris qu’il ne faut laisser personne parler à sa place.

Valentine Pastor 

 

[1] : Carboni, Nicolas « Regards croisés sur la jeunesse engagée des « années 68 » (1968-1986) », Siècles, Centre d’histoire « Espaces et Cultures », mai 2006, pp. 75-88.

[2] : Perais, Denis, Nadine Floury, « Mai 68 – 10 millions de grévistes, un seul survivant : Daniel Cohn-Bendit ? », ACRIMED, 2008.

[3] : Ross, Kristin, Mai 68 et ses vies ultérieures, Le Monde Diplomatique, 2008.

[4] : Carboni, Nicolas, op. cit., 2006. 

[5] : Daniel Cohn-Bendit est devenu ensuite bien plus « centriste », soutenant par exemple Emmanuel Macron durant sa campagne présidentielle de 2017 qui n’a pas commémoré les 50 ans du mouvement lorsqu’il a été élu Président.

 

La jeunesse engagée de Mai 68 voulait « changer le monde », qu’en est-il de la jeunesse aujourd’hui ?

La jeunesse révoltée de Mai 68 refusait de se résigner face à l’ordre établi. Alors qu’Alfred Sauvy prédisait déjà en 1959, « Ces enfants vont faire parler d’eux non seulement par leurs besoins mais bientôt par leurs idées, leurs actes [1]», les étudiants en 1968,  animés du désir de réinventer collectivement la société et faire entendre leur voix politique, s’engagèrent. Mais qu’en est-il de la jeunesse d’aujourd’hui, souvent présentée comme égoïste et dépolitisée par leurs aînés ? Cinq étudiants s’expriment sur ce que représente, pour eux, Mai 68, ainsi que sur leurs conceptions de l’engagement en 2023.

Le mouvement de Mai 68 est essentiellement vu comme une révolte de la jeunesse. Anna, 20 ans, considère ainsi cet évènement comme « le symbole d’une mobilisation massive de la jeunesse pour ses droits » d’abord à Nanterre (Voir article 1) puis au cœur du Quartier Latin à partir du 3 mai 1968 avec l’engagement radical de la rue d’Ulm ou le blocage de la Sorbonne au soir du 13 mai. Ce soir-là, les étudiants semblent triompher dans la lutte violente contre les forces de police. Mais cette occupation est avant tout une expérience collective de plus d’un mois, moment de débats dans les amphithéâtres, moment où la parole des étudiants se libère sur ses désirs et ses espérances. Cette jeunesse ne veut cependant pas, comme le souligne Michelle Zancarini-Fournel, « se refermer sur ses problèmes spécifiques, et plutôt affirmer sa nature politique et contestataire de l’ordre social [2]» en ouvrant l’université jour et nuit aux travailleurs. Noémie, 20 ans, conserve cette image, elle pense Mai 68 comme une « révolte des étudiants et des travailleurs qui, face à l’indifférence ou au mépris du gouvernement, réclament une transformation profonde de la société ».

Aujourd’hui, en France, l’impression qu’un changement radical est nécessaire est toujours véritablement ancrée dans la population. D’après le Baromètre 2020 de la Direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (Djepva) [3] « 69 % de nos concitoyens estiment que la société a besoin de changer profondément d’orientation ». Les jeunes entre 18 et 30 ans sont plus mesurés et perçoivent ce changement moins indispensable. Cela amène à penser qu’ils sont moins engagés qu’en 1968, impression qui semble être confirmée par leur faible engagement sur les ronds-points au moment des Gilets jaunes ou dans les instances de débats « grand débat » crées par le gouvernement. Alexandre, 22 ans, partage à ce sujet que « l’image ultra politisée de Mai 68 ne me parle pas trop, je ne suis pas véritablement engagé politiquement ».

Cependant l’enquête de la Djepva met aussi en valeur la tendance à la hausse de l’engagement bénévole qui concerne 40% des jeunes en 2020 et cette tendance n’est pas près de s’arrêter puisque les deux tiers des 16 000 lycéens sondés en 2018 par le Cnesco [4] ont exprimé leur volonté de s’engager à l’âge adulte. Avec une préférence, et on observe ici un changement, pour les actions ponctuelles et spontanées, détachées de tout parti politique et de toute organisation traditionnelle. La jeunesse d’aujourd’hui semble davantage attachée à des actions concrètes, individuelles, qui peuvent être radicales mais l’idéologie semble moins importante que la pratique. Maya, 20 ans, incarne bien ces nouvelles formes d’engagements présentent chez tous les étudiants interrogés : « J’ai ces valeurs, par exemple, de féminisme, d’écologie, je suis contre le racisme mais je ne fais pas partie d’une association, je vais à des manifestations mais pas régulièrement. Cependant, cela influence mon quotidien, notamment mes convictions écologiques : je mange moins de viande, je fais attention à ce que j’achète, je cherche à réduire le plastique ou j’évite la fast fashion ».

Mais il serait mensonger de s’arrêter à ce constat qui tend à montrer l’engagement des jeunes comme définitivement individualiste et, par conséquent, à l’opposé de l’engagement de la jeunesse de Mai 68 plus collectif et idéologique. Par exemple, Noémie partage son envie d’intégrer prochainement une association car « l’action est plus efficace quand elle s’inscrit dans un collectif ». Alice, 21 ans, complète : « Mes convictions influencent en premier lieu mon quotidien mais je sais qu’on n’obtiendra de réels changements qu’avec des actions collectives et de grande ampleur ». Dans l’actualité, des actions récentes peuvent ainsi faire écho aux actions de Mai 68, à l’image du blocage de la Sorbonne en 2020 ou plus récemment, des grèves des étudiants contre la réforme des retraites où l’on a pu apercevoir le slogan brandi par une manifestante « Manu, tu nous mets 64, on te re-Mai 68 ».

Pour Alexandre, il est « normal que Mai 68 soit un point de repère pour les jeunes engagés d’aujourd’hui ». Noémie et Anna partagent son analyse mais précisent que « certaines problématiques ont changé, à l’image des questions de représentation et d’écologie, donc un nouveau Mai 68, identique, est peu plausible. ». Pourtant Maya questionne « la capacité de la société à changer en l’absence de luttes comme en Mai 68 ». Ce point de vue est partagé par Alice qui s‘interroge : « Existe-t-il véritablement un autre moyen de se faire entendre ? ».

Finalement, alors que le pessimisme est de mise dans la société française, la jeunesse, ou du moins une partie, est décidée à s’engager et faire entendre sa voix, que ce soit par des actions individuelles et ponctuelles ou des actions collectives qui peuvent faire écho à Mai 68 resté dans les mémoires. Mais une chose est sûre, pour ces étudiants, le slogan « Soyez réaliste, demandez l’impossible » est toujours autant d’actualité.

Manon Kubiak 

 

[1] : Alfred Sauvy, La montée des jeunes, Calmann-Lévy, 1959.

[2] : Philippe Artières et Michelle Zancarini-Fournel, op. cit., 2018. 

[3] : Brice Mansencal L., et.al. (CREDOC), 2020, Baromètre DJEPVA sur la jeunesse 2020, INJEP, 2020. 

[4] : Cnesco (2018). Engagements citoyens des lycéens : enquête nationale. 

 

Illustrations : Evern et Céèf  

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